Nationalisation des banques : les scénarios envisageables

Les craintes sur les françaises ont ranimé le spectre des nationalisations. Les valeurs bancaires ont perdu plus de la moitié de leur valeur en bourse cet été 2011 sur fond de et de rumeurs incessantes.

Les investisseurs n’ont plus confiance et craignent une crise de liquidité. C’est pourquoi l’on entend de plus en plus que la des banques est une nécessité financière de la part de plusieurs acteurs économiques dont Christine Lagarde, la directrice générale du .

Cette recapitalisation peut se faire par la des banques, cela ne serait pas la première fois et d’autres pays plus libéraux que la France comme l’Angleterre ont franchi le pas lors de la crise financière de 2008 (nationalisation de ).

Nous allons étudier la légalité d’une nationalisation, les scénarios possibles de nationalisation des ainsi que les risques pour les .

Une nationalisation est un transfert de la propriété privée à l’État, une substitution de la propriété privée à la propriété publique.

Les dernières nationalisations ont été faites avec une indemnisation des personnes privées expropriées comme cela a été le cas en France avec les nationalisation du début des années 1980 sous le gouvernement Mauroy (présidence de François Mitterrand).
Les nationalisations peuvent également se faire sans contrepartie financière, sous forme de confiscation. Cela a été le cas dans les régimes léninistes.

Légalité des nationalisations d’entreprises

Il existe plusieurs contraintes légales aux nationalisations d’entreprises en France car la nationalisation d’une entreprise est en contradiction avec le droit à la propriété privée qui est garanti par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 a une valeur constitutionnelle en France. Les articles 2 et 17 proclament la propriété comme un droit indéniable et sacré mais l’article 17 explique également que la nécessité publique peut prévaloir sur la propriété dans certaines conditions.

Article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 :

La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

La nationalisation des banques est donc constitutionnellement légale s’il y a :

  • une nécessité publique
  • une indemnisation juste et préalable

Nécessité publique d’une nationalisation

Lors des nationalisations de 1982, la nécessité publique avait été justifiée par « le fait que ces nationalisations seraient nécessaires pour donner aux pouvoirs publics les moyens de faire face à la crise économique, de promouvoir la croissance et de combattre le chômage ». On peut donc légitimement supposer que la nécessité publique pourrait également être invoquée dans le contexte de crise actuel.

Extrait décision n° 81-132 DC du Conseil Constitutionnel, 16 janvier 1982 :

19. Considérant qu’il ressort des travaux préparatoires de la loi soumise à l’examen du Conseil constitutionnel que le législateur a entendu fonder les nationalisations opérées par ladite loi sur le fait que ces nationalisations seraient nécessaires pour donner aux pouvoirs publics les moyens de faire face à la crise économique, de promouvoir la croissance et de combattre le chômage et procéderaient donc de la nécessité publique au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789

Indemnisation juste

En 1982, l’indemnisation validée par le Conseil Constitutionnel correspondait à une moyenne des cours sur 6 mois ou 1 an majorée du dividende et d’une indemnisation de 14 %.
C’est un peu le même principe que lors d’une OPA, il y a toujours des personnes :

  • qui font une plus-value car elles avaient achetées lorsque l’action était au plus bas.
  • qui font une moins-value car, actionnaires de longues dates, ils ont un PRU (Prix de Revient Unitaire) élevé et comptaient conserver leurs actions à long terme.

Les 2 conditions de nationalisation des banques peuvent être actuellement remplies, une nationalisation des banques est donc légalement envisageable.

Scénarios de recapitalisation des banques

Dans le contexte de crise actuel, l’état français pourrait prendre la décision de nationaliser certaines banques et sociétés d’assurance.
Plusieurs scénarios de recapitalisation sont envisageables (Prêt obligataire aux banques, , ), ils vous sont présentés du plus probable au moins probable.

Prêt obligataire aux banques

L’état pourrait prendre une participation dans les banques sous forme de prêt obligataire comme il l’a déjà fait en 2008 lors de la crise financière des subprimes et la chute de Lehman Brothers. Les banques restent privées et reçoivent une aide de l’état sous forme de prêt.
C’est le scénario le plus probable. Ces prêts avaient été remboursés très rapidement par les banques et avaient fait gagner à l’État environ 1,4 milliards d’euros. Ce prêt a incité les banques françaises à ne pas se recapitaliser sur les marchés lorsqu’elles en avaient l’occasion et explique leur fragilité actuelle.

Ce scénario est favorable à l’actionnaire, il ne perd rien et la banque qu’il détient est soutenu financièrement par l’État tout en restant privée.

Nationalisation par entrée au capital des banques

L’état peut également entrer au capital des banques. Ce scénario n’était que peu probable il y a encore 1 ou 2 mois selon la plupart des dirigeants mais cette solution devient de plus en plus plausible et n’est plus réservée aux candidats très à gauche.

Il devrait toutefois se frotter au lobbying des banques qui est puissant et cela ne serait pas sans difficultés.
L’entrée de l’état au capital des banques renforcerait les capitaux propres de celles-ci et leur solidité face aux marchés financiers.
L’état devrait également respecter les contraintes d’indemnisation vues dans le paragraphe « Légalité des nationalisations d’entreprises ».

Impact pour les actionnaires : Si le cours d’une valeur bancaire était en moyenne à 10€ sur les 6 derniers mois, l’état entrera à 10 € + une légère indemnisation (voir paragraphe « Indemnisation juste »). Il ne paiera pas plus cher pour empêcher les plus-values éventuelles liées à la spéculation. Il ne paiera pas non plus moins cher que le cours car la constitution lui interdit et pour éviter de donner un signal négatif au marché. Il faut bien comprendre que l’état devient actionnaire, il n’a donc pas intérêt à voir la valeur de la banque chuter une fois que celle-ci est nationalisée.
L’impact pour l’actionnaire sera donc uniquement lié à la .
Si un actionnaire possédait 100 actions sur un total de 1000 donc 10 % et que l’état souscrit à une augmentation de capital de 500 actions, il existe alors 1500 actions de l’entreprise et l’actionnaire qui en possède 100 ne détient plus que 6,7% (100 / 1500 = 6,7 %) de la banque au lieu de 10 % auparavant.
Il recevra moins de dividendes puisque le résultat sera maintenant distribué pour 1500 actions, c’est l’impact de la dilution.

Augmentation de capital publique

L’augmentation de capital des banques peut également se faire par une augmentation de capital publique par l’intermédiaire d’investisseurs institutionnels, mais c’est peu probable.
Dans ce scénario, l’augmentation de capital des banques se ferait avec une décote pour inciter les investisseurs à placer leur argent.

Impact sur les actionnaires : Si l’on reprend notre valeur bancaire actuellement cotée 10 €. L’augmentation publique de capital se ferait à 9 € (décote d’1 €), le cours de l’action chuterait donc pour se situer entre 9 et 10 €.
Il y aurait également une dilution des anciens actionnaires comme dans le cas d’une entrée au capital de l’état. Il serait néanmoins possible de ne pas subir la dilution et de conserver la même part de l’entreprise en souscrivant à l’augmentation de capital (publique) mais cela signifierait augmenter son investissement et donc son exposition à cette valeur bancaire.

Conclusion

Il ne faut pas avoir peur outre mesure de la nationalisation ou la prise de participations de l’état dans les banques françaises. Le risque d’expropriation et de confiscation est quasi nul en France car il est constitutionnellement interdit.
Le principal risque est lié à la dilution des anciens actionnaires en cas d’augmentation de capital qui entrainerait une baisse des dividendes.
Il faut également garder à l’esprit que si une banque est nationalisée c’est que sa santé économique est sur la sellette et qu’une chute de sa valeur boursière aura certainement eue lieue avant la nationalisation.

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