Le taux d’emprunt des obligations de l’état français est au plus haut depuis début août 2011.
Après avoir atteint un plus bas à 2,44 % le 12 septembre, le taux de l’OAT à 10 ans de la France est passé de 2,53 % le 4 octobre à 3,13 % le 14 octobre, soit une hausse de 24 % en à peine 10 jours. Dans le même temps, le CAC 40 a bondi de 16 %.
Le taux des obligations de l’état français (OAT) représente le taux auquel la France emprunte à des investisseurs sur les marchés financiers.
Le risque d’emprunter à la France se serait-il considérablement accru dans les 10 derniers jours alors que l’indice boursier français était en forte hausse ? c’est la question à laquelle nous allons tenter de répondre.
Lorsque le taux d’emprunt monte, cela signifie que la France a du mal à trouver des investisseurs avec le précédent taux d’intérêt et qu’elle est obligée de proposer un meilleur rendement pour attirer des fonds et financer sa dette.
L’augmentation des taux d’emprunt des OATs n’est généralement pas un bon signe pour le pays car cela signifie la plupart du temps :
- qu’il doit payer plus cher pour emprunter la même somme d’argent
- une montée de l’aversion au risque concernant la possibilité de défaut de paiement du pays
La montée du taux de l’OAT 10 ans signifie que les investisseurs préfèrent investir dans d’autres actifs que la dette française.
On pourrait penser que cette montée des taux est due à l’augmentation du risque de défaut de la France mais dans cette hypothèse, l’indice boursier français, le CAC 40 aurait dû chuter et non monter de 16 % car un risque accru de l’état français impacterait également les entreprises françaises.
Le graphique ci-dessous compare l’évolution du taux d’emprunt à 10 ans de l’état français (en noir) avec le CAC 40 (en vert) sur les 6 derniers mois (mai 2011 à octobre 2011). On voit clairement la corrélation entre les 2 courbes mais on aurait pu s’attendre à une corrélation inversée.
Sur les 6 derniers mois, le taux d’emprunt a augmenté lorsque le CAC 40 a monté et le taux à baissé lorsque le CAC a chuté.
Le taux d’emprunt à 10 ans a fortement chuté en août en même temps que les indices boursiers lorsque la crise des dettes souveraines européennes a refait parler d’elle. Et paradoxalement, lorsque la faillite des états européens faisait la une des médias, le taux d’emprunt de l’état français baissait, les investisseurs étaient donc nombreux à vouloir financer la dette française.
Pourquoi les taux d’emprunt baissent lorsque le CAC monte ?
Cette corrélation paradoxale est liée à l’aversion au risque des investisseurs et au processus d’arbitrage.
Lorsque les indices boursiers chutent pour diverses raisons, certains investisseurs vendent leurs positions en actions jugées trop risquées et achètent des obligations d’états (OAT) jugées sûres comme celles de la France ou de l’Allemagne. Ces achats d’obligations d’état font chuter le taux d’emprunt par le biais de l’offre et la demande.
Lorsque la Bourse remonte, les investisseurs estiment que le rendement offert par les obligations d’état n’est plus assez attractif par rapport aux gains possibles sur le marché actions. Les investisseurs procèdent à un arbitrage, ils vendent leurs obligations d’état et achètent des actions, ce qui a pour conséquences de faire monter les indices boursiers comme le CAC 40 et augmenter les taux d’emprunt obligataires.
Il faut toujours garder à l’esprit que les taux montent lorsqu’on a besoin d’attirer les investisseurs et qu’il est plus difficile d’attirer les investisseurs lorsqu’il existe d’autres possibilités de placements financiers offrant un meilleur rendement.
Il est également nécessaire de comprendre que l’argent placé en France ne disparait pas lors des fluctuations du marché, il ne fait que changer d’actif financier, passant par exemple des obligations d’état aux actions et vice-versa.
Ce système de vases communicants ne fonctionne pas dans un pays gravement en crise comme la Grèce car les investisseurs préféreront arbitrer en faveur d’investissements dans d’autres pays moins touchés comme par exemple la dette de la France ou de l’Allemagne. C’est également pour cela que les montées spectaculaires des taux d’emprunt grecs, irlandais, portugais et espagnol (PIGS) ont provoqué des baisses des taux d’emprunts français et allemands. Les investisseurs préférant vendre les obligations des pays en difficulté et les remplacer par des obligations d’états jugés plus sûres, ce qui ne fait que renforcer la baisse d’un coté et la hausse de l’autre.